Archives de catégorie : extrait 91

État des lieux

Automne 2012

Ouverture

  • Éducation populaire, éducation des humains /Entretien avec Gérard Noiriel (+abstract*)AU-DELÀ DE LA MÉDIACRATIE
  • GRAND TÉMOIN  : Edwy Plenel – « Occupons-nous de dépolluer la mer ! »
  • Télévision, ton univers impitoyable entretien avec Judith Bernard
  • L’écriture, un mode d’élucidation de la pensée entretien avec Jean-Pierre Thibaudat
  • Les médias dans le Printemps québécois par Édith Brunette
  • 89.4 Micro-libertés par Thomas Hahn
  • GRAND TÉMOIN  : Henri Maler – Pour une autre politique des médiasCHRONIQUE DU THÉÂTRE ORDINNAIRE
  • What’s new, Pussy Cat ? par Bruno BoussagolDE L’ASPHALTE ET DES PLUMES
  • Denis Lavant, comédien dans l’aventure des mots entretien avec Denis LavantSI LOIN SI PROCHE
  • Printemps arabes, le temps des interrogations entretien avec Raja FarhatLIBRES ÉCHANGES
  • L’histoire de la Corse n’a pas (encore) eu lieu entretien avec Jean-François BernardiniTERRAINS VAGUES
  • Rroms. Un autre accueil est possible Julien Beller / paroles sur le vif
  • Revenons à nos moutons ! par Valérie de Saint-DoGUSTAVO GIACOSA, ARTISTE-PASSEUR
  • par Myriam Bloedé
  • Entretien
    HÔPITAL SILENCE !
  • Art et folie, l’éternel recommencement par Marie LimpatienteEFFRACTION
  • « La qualité, c’est terminé ! » par Élisabeth Hanet/p>FIL D’ARIANE
  • Artistes contre handicapés ? par Thomas Hahn
  • La violence du langage est proportionnelle… par Ludmilla IvanovaAGIT PROP
  • Ruffec. Une expérience de l’humain par Olivier SchneiderVILLES ET THÉÂTRES
  • Un CDN itinérant entretien avec Johanny BertPAS DE CÔTÉ
  • Traverses et itinérances par Myriam BloedéMAKING OF
  • L’esprit du temps et la vie des hommes par Lætitia Jacquart
  • Lussas, village-monde par Samuel WahlCONTRE-CHANT
  • Gwoka session ! entretien avec Grégory PrivatVISUEL
  • Forces en présence par Gil RabierPARTI PRIS
  • Notre dernière nuit par Eddy Maaroufi & Miléna WendtPETITES THÉORIES JETABLES
  • par Jacques LivchineÉCRITS par Thomas Hahn / par Eddy Maaroufi

    Points de mire

Édito

Un être humain fondamental

Non, c’est vrai, vous avez raison. On ne peut pas dire que cette rentrée française soit très joyeuse, on ne peut pas dire ça.

Mais chacun sait ce qu’il en est et nous n’épiloguerons pas ici sur le comportement scandaleux du nouveau gouvernement socialiste vis-à-vis, notamment, des Rroms. Cette fragile et inoffensive minorité de concitoyens européens continue donc, dans un régime qui ose s’intituler « de gauche », de servir de boucs émissaires à des politiques suivistes et sans courage.

Voilà donc à quoi ont servi nos voix. Voilà ce qu’est devenue chez nous ce qu’on appelle encore « démocratie ». Certains disent que c’était prévisible. Non, pas pour moi, pas à ce point.

Nous défendons depuis nos débuts toutes les cultures porteuses d’humanité, de relation, de beauté, d’art et de vraie poésie, dont celles des Rroms font partie. Car elles sont des alliées infiniment précieuses dans notre indispensable résistance à la déshumanisation en cours, menée partout dans le monde par ceux que l’on nomme étrangement « libéraux ». Nous continuons à le faire. Nous continuerons à le faire.

Concernant les Rroms et le sort qui leur est fait en Europe et en France, notre numéro 81 « L’autre, sans qui je meurs », épuisé depuis un moment, mais dont on peut trouver la version numérique sur notre site (www.horschamp.org), témoigne suffisamment de nos convictions ainsi que de la richesse et de la force de leurs cultures.

Notre position est claire et connue.

Nous le disons, le répétons, le redirons et le répéterons : nous avons besoin d’eux, et de tous ceux qui continuent à croire dur comme fer que la première qualité de l’homme, c’est le rêve. Nous avons besoin d’eux pour nous rappeler ce qu’est un êtrehumain qui ne cède pas devant la matière, devant le chiffre, la standardisation, la mort de l’imaginaire, la disparition de l’échange gratuit et de la fulgurante beauté de la relation. Un être humain non pas « premier », un être humain vraiment humain, un être humain fondamental.

Non, on ne peut pas dire que cette rentrée soit joyeuse.

Mais on peut quand même vraiment se réjouir d’une chose : le sort que nos amis québécois ont réservé à leur représentant local de la multinationale ultralibérale. Oui, après six mois de manifestations et de grèves, étudiants, lycéens et citoyens conscients ont finalement réussi, face à une répression effrayante, à se débarrasser de leur père Ubu, leur Sarkozy, leur Berlusconi local. Jean Charest, Premier ministre impudent et incompétent, a pourtant tout fait pour utiliser le chaos qu’il a lui-même créé afin de masquer un système corrompu et détourner l’attention publique des affaires sordides et du pillage des ressources naturelles que constituait le « Plan Nord ».* Il est tombé.

Merci les Québécois, merci à ce petit peuple courageux isolé dans un océan anglo-saxon et ultralibéral qui menace sans cesse de l’engloutir. Merci à vous de nous donner du courage. Merci à vous d’avoir su résister à une presse majoritairement corrompue et aussi affaiblie que la nôtre. Nous qui suivions ce mouvement de loin, de l’autre côté de l’Atlantique, et qui trouvions d’ailleurs que les Français auraient pu être plus solidaires et plus présents, une chose nous a frappés. Cette révolte a produit de la vraie beauté, et c’est un signe qui ne trompe pas. Elle a produit de l’art, de l’invention, de l’enthousiasme, de l’intelligence et une magnifique énergie.

Si l’on doute que l’art puisse être remis en vie, vraiment en vie, c’est-à-dire en lutte, en recherche et en invention, il suffit de regarder les somptueuses vidéos réalisées par des lycéens et étudiants québécois dans les rues de Montréal et d’ailleurs, qui racontent leur combat sous forme de flashmobs ou à la façon d’une superbe comédie musicale. Ou encore, en Espagne, celles de ces danseurs de flamenco qui envahissent les banques avec leurs musiques, leurs chants et leurs danses. On trouve tout ça sur internet et si ce n’est déjà fait, je suis sûr que vous le trouverez. Et il faut écouter les chants reliés aux pulsations du monde de nos amis corses d’I Muvrini. On trouve, dans toutes ces expressions, la preuve vivante et irréfutable que l’art n’est autre qu’un combat. Un combat pour l’intelligence, un combat pour la vie. Un combat pour la sensibilité.
L’art est un combat.

Nicolas Roméas